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Life Is But A Dream
29 janvier 2007

Dream On (séquence 25)

Séquence 25: Secrets

"Séquence 30: rupture
Le lendemain de la dispute, David se rend au domicile de Sofia. Il y va avant un cours, la mort dans l'âme, car il y va pour rompre. La scène sera courte: il profite de ce que quelqu'un sort pour entrer dans l'immeuble, se trouve devant sa porte, sonne: Sofia ouvre, sourit avec ravissement, veut l'embrasser, mais il la repousse doucement. Comme il ne peut pas la regarder il lui dit les yeux fixés sur le sol que l'autre nuit était une erreur, qu'il aime sa femme, qu'ils ne doivent plus se voir hors des cours, etc.  Elle secoue la tête, veut lui prendre la main mais il la repousse à nouveau, elle se met à sangloter mais il part quand même sans se retourner, pour s'engouffrer dans l'escalier.

Séquence 31
David traverse le reste de la semaine comme un fantôme. Au cours du mercredi, Sofia ne se montre pas. Il le passe à fixer la chaise vide avec un regard morne. Seul moment de bonheur: le dimanche après-midi avec sa femme et sa fille, au Cirque Grüss qui donne représentation au Bois de Boulogne. Il s'extasie devant les prestations époustouflantes des artistes, et rit aux larmes devant les pitreries des clowns. Sa fille bat des mains avec gaieté devant le match de football perturbé par Syndha, une éléphante qui semble s'amuser au moins autant que les artistes et les spectateurs. David va même relancer l'énorme ballon que l'animal a projeté hors de son terrain de jeu. Il ne peut néanmoins s'empêcher de vérifier la présence d'appel durant l'entracte: rien. Les autres jours passent de la même manière, jusqu'au mercredi. Il est de plus en plus abattu: non seumement rompre n'a rien arrangé, mais il se sent comme s'il était mort.

Séquence 32: retrouvailles
Le cours est déjà commencé. On croit au début que Sofia ne viendra pas car sa chaise est à nouveau vide, mais finalement on frappe doucement à la porte: elle entendre sans mot dire, en regardant David de biais. Le silence s'installe tandis qu'ils échangent un regard bref, puis David reprend son cours.

A la fin, on sent qu'il n'en peut plus. Sofia est sur le point de sortir, toujours en silence, mais il l'appelle par son nom de famille. Elle se retourne, étonnée mais avec un regard de défi. Il attend que tous les élèves sortent. Quand tous ont quitté le couloir, il referme la porte, la regarde intensément puis ferme la porte à clé. Elle n'a pas le temps de réagir qu'il la serre contre lui et l'embrasse. Elle le repousse brutalement, le gifle et le fixe avec des yeux brûlants. Il tente de l'approcher à nouveau mais elle fait mine de se débattre et pivote vers le bureau. Il attrape alors ses deux mains sans cesser de le regarder droit dans les yeux, la bloquant contre le bureau. Elle se laisse aller en soupirant. Ils font l'amour là, sur le bureau.

B.O sur les scènes 31 & 32: My Secret de Jane Birkin

 

Myspace Mp3 Player, MySpace MP3 Players, Flash MP3 Players



Si tôt après avoir écrit cette dernière phrase, Chiara reçut un coup de fil de Christian.  Il lui proposa d'aller voir un film le soir-même à l'UGC. Elle acquiesça sans hésiter, mais se rappela après avoir raccroché qu'elle avait prévu de sortir en boîte avec Marina... Elle hésita: devait-elle rappeler Christian, ou Marina? Finalement, après un court temps de réflexion, elle décida d'appeler cette dernière, pour annuler leur rendez-vous.

La soirée se passa merveilleusement bien avec Christian. Ils allèrent d'abord manger au Mc Donalds - un endroit où Chiara n'acceptait généralement jamais d'aller - , puis virent Little Miss Sunshine, l'histoire d'une adorable petite fille et de sa famille, qui se mettaient en quatre dans une atmosphère bon enfant pour emmener cette dernière au concours national de Little Miss Sunshine. Ils profitèrent de l'obscurité pour se peloter, ce qui amusa grandement Chiara qui n'avait jamais eu l'occasion de le faire avec un garçon durant son adolescence. Jusque là, elle n'avait ressenti qu'une grande affection et le désir diffus "que ça marche" avec lui. Mais là, le touchant vraiment pour la première fois, elle sentit un vif désir la prendre au ventre et descendre jusque ses orteilles. A un moment elle guida sa main vers son entrejambe: il sourit et explora l'endroit avec douceur. Le film était bien mais dieu qu'il était long...

Le film fini, Christian proposa de ramener Chiara chez elle. Mais celle-ci s'approcha de façon à avoir son visage tout près du sien, et murmura tout en caressant les pans de sa veste en cuir: "On pourrait aller chez toi... si tu veux!

- T'es pas obligée, tu sais..."

Elle éclata de rire, et répliqua:

- J'ai 23 ans, j'ai passé l'âge de me sentir "obligée"... alors?"

Sur le pas de la porte, Christian suggéra qu'ils ne fassent pas de bruit pour ne pas réveiller ses colocataires et les amis qui dormaient pour l'un sur le canapé, et l'autre sur un matelas par terre. Ils avancèrent donc à tâtons sur le parquet en faisant attention de ne pas marcher sur un pied, et se faufilèrent dans la chambre de Christian. Dans le salon, une voix provenant du canapé demanda:

- Hé Dan, tu dors?

- Je dormais, connard...

- On dirait que le petit va conclure... pas trop tôt!

- C'est toujours plus tôt qu'toi...

- J't'emmerde, connard..."

Le lendemain matin - ou plutôt en fin de matinée - elle se réveilla plus tôt que Christian. Il dormait sur le côté, ne ronflait pas, Dieu merci, et pour la première fois elle le trouva beau. Chiara l'avait toujours trouvé mignon, mais n'avait jamais pensé qu'il était beau. Mais maintenant qu'elle le regardait plongé dans ses rêves, elle réalisa avec tendresse qu'il était vraiment beau. Elle oublia, bien entendu, que chaque homme qui croisait sa route lui faisait le même effet: cela signifiait qu'elle s'attachait. Elle se glissa sans bruit hors du lit, et son téléphone à la main, passa la tête hors de la chambre pour vérifier s'il y avait ou non du monde dans le salon: personne en vue ni à ouïr. Elle s'assit sur le canapé occupé quelques heures avant par l'invité mystère numéro un, et réfléchit à sa nuit, et aux heures passées avec Marina.

Une partie d'elle voulait l'appeler tout de suite et lui dire qu'elles ne devaient plus se revoir, puis retourner se peletonner contre Christian, mais l'autre voulait reprendre ses affaires dans la chambre, s'habiller discrètement et partir en douce pour aller la rejoindre. Jamais de sa vie, elle ne s'était sentie aussi brutalement divisée ; cela lui semblait d'autant plus étrange qu'elle ne pensait pas être amoureuse de Marina. Mais de la façon la plus étrange qu'il soit, elle avait besoin d'elle. Pourtant, Chiara savait qu'elle devait faire un choix, et le faire tout de suite: elle avait vécu durant deux ans une double vie pour satisfaire les exigences d'un homme marié qui avait finalement quitté et sa femme, et elle ; elle ne voulait plus avoir à le faire, jamais. Tout en pensant elle jetait des coups d'oeil furtifs à la porte de la chambre de Christian: elle aurait presque pu l'entendre respirer dans son sommeil, tant le silence autour d'elle était épais et pesant. Sur l'écran de son téléphone, apparaissait toujours le prénom: Marina. Elle savait ce qu'elle devait faire, mais savait aussi qu'elle ne voulait pas le faire. Mais elle n'était pas David. Elle n'aurait pas de secrets.  Finalement, elle prit sa décision: son pouce toucha la touche "appeler" ; une tonalité se fit entendre, puis la voix de Marina: "Allô?

- ... Chiara ne put d'abord souffler un mot.

- Allô, Chiara?

- Oui, c'est moi, salut... Je t'appelle pour te dire qu'on ne peut plus se voir... J'ai une personne dans ma vie, je t'en ai pas parlé avant parce que c'était pas encore très sérieux, mais... ça l'est maintenant.

- ...

- Tu es là? Demanda-t-elle d'une voix plaintive.

- Et donc tu me plaques au téléphone, comme ça... c'est drôle, je me doutais que ça arriverait vite, mais je pensais pas que tu le ferais au téléphone...

- Je te plaque pas, corrigea Chiara, on n'a jamais été "ensemble" autant que je sache, poursuivit-elle d'une voix malencontreusement sèche.

- Va te faire foutre..."

Marina lui raccrocha au nez. "C'est déjà fait...", répondit Chiara en pensée. Ce fut comme si on avait desserré une visse de son coeur: elle gambada jusqu'à la chambre de Christian qui venait de se réveiller et regardait autour de lui, perplexe de ne pas la voir, mais sourit quand elle sauta sur le lit pour l'embrasser. Il s'enquit d'un air faussement fâché: "Hé, je me suis réveillé et t'étais pas là! Quoi que tu faisais?

- Je téléphonais à ma mère, mentit-elle avec aplomb. Je découche rarement sans la prévenir avant, du coup elle s'inquiétait."

Christian accepta l'explication avec bonhommie. Dès le début de sa relation avec Marina, Chiara avait simplement songé que tant qu'il ignorait qu'elles s'étaient revues après la nuit au Pulp, tout irait bien. Pour ne pas lui laisser le temps de discuter, elle lui coupa la parole avec un baiser et ôta le t-shirt qu'elle lui avait volé pour dormir.


Séquence 26: Réveillon

Le réveillon du Nouvel An se déroula finalement chez Laurent, sans son consentement exprès naturellement. Chiara s'y rendit accompagnée de Christian, toute fière d'avoir un petit ami à lui présenter. Laurent les accueillit avec un sourire narquois à l'attention de Chiara. Tout le monde était là: Caroline, le gars avec qui elle sortait depuis deux semaines - un exploit - , Fathia... Même Marion se joignit à eux, avec l'envie de changer d'air et d'idées après avoir rompu avec son copain. Une dizaine d'invités, dont leur ami David, qui avait été autrefois le bourreau du coeur de Chiara, se tassaient dans le cagibi qui servait de studio à Laurent. Déjà tous aux trois quart soûls et s'ennuyant, ils décidèrent d'allumer la télévision: une chanteuse que personne ne connaissait se trémoussait sur ce qui pouvait s'identifier comme un vieux tube oublié des années quatre-vingt. Une horreur audiovisuelle, songea Chiara. Ce qui était curieux, c'est que la chanteuse semblait s'amuser. Mais plus étrange encore, le public lui semblait s'éclater! Un invité dont Chiara n'avait pas retenu le nom s'exclama: "Ils ont pas autre chose à glander un soir de réveillon, ces gens?

- Tu peux pas comprendre, c'est la nostalgie! C'était mieux avant... Avant, y'avait Indochine et Emile & Image, avant y'avait le sida que pour les pédés, avant on pouvait fumer dans les lieux publics, avant... Répliqua Sandrine, une fille que Chiara avait rencontrée au cours d'une soirée organisée par David. Celle-ci l'interrompit:

- Et surtout, avant ils étaient jeunes et beaux alors que maintenant ils sont vieux et ringards, donc ils se reconnaissent! Sans déconner, moi aussi ça me surprend qu'on s'éclate sur cette merde mais c'est leur droit après tout. Puisqu'on sait que c'est nul on peut éteindre, maintenant?

- Bonne idée, renchérit David, si on mettait Kajagoogoo?"

Kajagoogoo était un de ces groupes heureusement disparus issus des années quatre-vingts, que David aimait bien ressortir dans la conversation, entre Roxy Music et Talking Heads.

- "Y'a pas ton Kajacrocrotte ici, l'envoya promener Laurent avec un ricanement méprisant. Et je veux regarder ça, c'est trop bon: c'est présenté par Arthur!

- Arthuuuuuur! répéta une autre connaissance lointaine de Chiara, Paul. Chouette, c'est Obispo maintenant! Il va reprendre quoi?!

- Quelle bande de boulets... "maugréa Chiara.

Marion renchérit d'un signe de tête. La pauvre, songea Chiara, elle qui était venue pour passer du bon temps, elle allait devoir se farcir ces abrutis et l'émission Arthur...

"- J'ai trouvé une bonne résolution à prendre pour l'année qui vient! Clama-t-elle à voix haute, de manière à ce que tout le monde l'entende. Jeter ma télé.

- Oh, très bonne idée! Acquiesça Sandrine, qui reporta ensuite son attention sur Pascal Obispo qui chantait "On va s'aimer" à tue-tête.

- Ouais, je vais jeter ma télé. Et je vais donner l'exemple en jetant... Celle-là! S'exclama-t-elle en montrant le poste de Laurent. Celui-ci crut qu'elle plaisant et réagit mollement:

- C'est cela même Claudette!"

Christian, lui, la regarda avec un petit sourire interrogateur: "Tu vas vraiment le faire?

- Tu m'en crois capable?

- Je crois que t'es capable de tout!" Admit le jeune homme.

Chiara se mit à rire, puis arracha le câble du téléviseur de sa prise. Laurent et les autres protestèrent, mais Chiara fit un clin d'oeil à Christian et lui demanda: "Tu m'aides, bébé?"

Christian ne répondit pas mais empoignit le téléviseur d'un côté tandis que Chiara tenait l'autre ;avant que Laurent ne puisse les arrêter, ils jetèrent le poste par la fenêtre restée grande ouverte pour laisser échapper la fumée des cigarettes. Ils entendirent un bruit de chute, puis un grand cri. Chiara et Christian se précipitèrent par la fenêtre pour voir qui poussaient ses cris: une petite grand-mère armée d'un colley nain pointait un regard furieux vers la fenêtre ; lorsqu'elle les vit, elle s'écria:  "Ca va pas non?! Vous auriez pu assassiner mon chien!

- Ben il a rien votre chien! S'exclama Christian en haussant les épaules. Et puis, ça n'aurait pas été un assassinat mais un homicide involontaire! Christian, licence de droit, enchanté Madame!

- Petits cons!"

Après cette parole de sagesse, la vieille dame poursuivit la promenade de son chien. David s'écroula de rire sur une chaise et fut rapidement imité par tous les invités. Caroline glissa un cd au hasard dans la chaîne hi-fi: c'était Dancing in the streets chantée par David Bowie et Mick Jagger, qui fut salué par des cris de joie. Seul Laurent, hors de lui, s'en prit à Chiara: "Putain, je t'ai demandé quelque chose? Tu vas me la payer ma télé maintenant qu'elle est sur le trottoir!

- Ben si elle est sur le trottoir elle te rapportera peut-être du fric... ricana Chiara entre deux pouffés de joint que Caroline venait de lui passer.

- Très spirituel, et qui vous a dit que vous pouviez taper dans ma réserve?! Tu me fais un chèque et maintenant. Laurent tapa sur la table dans l'espoir de paraître viril.

- Oh ça va, se moqua Chiara, tu devrais me remercier d'avoir bousillé ta télé pourrie, elle devait bien avoir cent ans...

- Au moins, renchérit Marion avec gaieté, je suis même étonnée qu'elle soit - pardon, qu'elle ait été, paix à son âme - en couleurs.

- C'est pas une raison! Persista Laurent d'un ton boudeur. J'y étais attaché à cette télé, j'ai découvert mes premiers films de John Woo là-dessus, et pleins d'autres!

- C'est devant elle aussi que tu t'es branlé pour la première fois je parie! Lança Paul.

- Ouais, aussi!

- C'était devant Rocco ou la blonde au gros cul qu'il se tapait?

- Les deux, mon général!!"

Ils portèrent tous un toast à feu le téléviseur de Laurent. Soudain, on frappa à la porte. Laurent enjamba les cadavres de bouteilles et de cannettes pour atteindre la porte, et l'ouvrit: son meilleur ami Florian pénétra avec un sac plein de ce que Chiara pensa d'abord être d'autres bouteilles. Mais quand Laurent lui demanda pourquoi il arrivait aussi tard, il expliqua:

"- Tu te souviens de mon pote Loïc, l'artificier?

- Euh ouais, comme ça...

- Ben on s'est bourrés la gueule tout à l'heure dans sa boutique, et avant de partir il m'a filé tout un tas de fusées... Tu vois où je veux en venir? conclut-il, excité comme une puce.

- Ben l'autre excité de Sarkozy là, il veut même pas de feu d'artifice à la Tour Eiffel, alors oublie...

- T'en fais pas! Insista Florian. Les flics vont juste faire gaffe aux Blacks et aux Beurs, or on n'est qu'un beau groupe de blancs non? Personne va nous contrôler!

- Euh tu m'excuseras, mais je fais partie de la race des "beurs", si je puis dire, intervint Fathia.

- Oh, pardon. Je voulais pas paraître offensant en disant ça. Tout ce que je disais, c'est que personne n'ira nous surveiller en principe. T'as dû remarquer toi-même que les flics demandaient plus souvent leurs papiers aux bandes de maghrébins qu'aux supporters bien blancs du PSG réputés pour leur civisme, non?

- C'est ce qu'on dit à la télé en tout cas! rit Fathia, qui habitait dans un quartier bourgeois. Donc tu comptes profiter de ta jolie couleur blanche pour foutre la merde un soir de réveillon, si je comprends bien?

- Mais pas du tout! Protesta Florian en jetant son sac de fusées. Je veux juste donner le feu d'artifice que Paris mérite, je suis pas une racaille...

- Je vois, les racailles c'est juste les nègres et les bougnouls, c'est bien ça? Railla Fathia.

- Hé, IL l'a dit, pas moi! J'emploierais jamais ces mots-là."

Comme Fathia éclatait de rire, il se détendit: "Tu te fous de moi, pas vrai?

- Oui... Vous les Blancs, vous êtes tellement drôles quand vous vous défendez d'être racistes...

- Je suis pas raciste! se défendit Florian.

- Qu'est-ce que je disais! J'ai bien compris va, te fatigue pas."

Elle lui tapa le bras amicalement, puis déclara qu'elle devait aller aux toilettes. Florian la suivit des yeux avec un petit sourire aux lèvres, puis demanda à Laurent: "Tu la connais d'où?

- C'est une copine de Chiara... répondit-il en montrant cette dernière d'un signe de tête. Elle m'a bousillé ma tévé!

- Qui ça, sa copine?! Comment elle s'appelle déjà?

- Non pas Fathia, CHIARA a jeté ma télé par la fenêtre!" Gémit Laurent avec impatience.

Florian secoua la tête en avouant qu'il ne comprenait pas grand chose, mais rappela qu'il serait bientôt minuit et que s'ils voulaient envoyer leurs fusées à temps, il était largement temps de partir. Caroline s'enquit avec inquiétude: "Mais euh, tu sais les faire marcher ces trucs, toi?

- Non mais c'est pas dur, t'allumes et ça décolle, basta!

- Mais on va faire ça où, y'aura plein de monde sur le champ de Mars!

- Bah on trouvera bien un coin d'herbe peinard où installer le machin. T'inquiète jolie blonde, tout ira comme sur des roulettes!

- M'appelle pas "jolie blonde"! Et je vous préviens tous: si vous vous faites choper, je m'enfuis et je vous connais plus jamais de ma vie.

- On reconnaît les amis..." Railla Chiara.

Et ils partirent. Ils prirent le métro jusqu'à Charles de Gaulle Etoile, où ils changèrent pour prendre la ligne six jusqu'à la station Bir-Hakeim. Une foultitude de gens étaient entassés sur le Champ de Mars, à attendre que minuit sonne. Toute cette foule interpella Chiara: elle se demanda s'ils étaient là parce qu'ils ignoraient l'interdiction relatives aux feux d'artifices, ou s'ils venaient là simplement par habitude. Toujours était-il qu'ils devaient être des milliers. Elle ne se sentait pas le moins du monde inquiète au sujet de la petite surpise que leur préparait Florian, sans doute en partie parce que son taux d'alcoolémie avait dépassé son imagination la plus folle. Ils durent chercher longtemps mais ils finirent par trouver un coin tranquille, caché par de grands arbres, loin de la foule. Néanmoins Florian recommanda à Sandrine et un type dont Chiara avait oublié le nom de surveiller les parages, au cas où un policier aurait eu envie de leur signaler que la pelouse était interdite aux piétons... Laurent et son ami étaient fous, comme s'ils s'apprêtaient à faire exploser une bombe devant le ministère de l'Intérieur. La main de Florian était crispée sur un briquet tout neuf, visiblement acheté exprès pour l'occasion, attendant l'heure H. De la sueur dégoulinait de son front: "Non mais regarde-le, murmura Chiara à l'oreille de Christian, on dirait un Irakien qui s'apprête à faire sauter un tank américain en plein Bagdad...". Christian sourit et en profita pour l'embrasser dans le cou ; Chiara le regarda avec un sourire étonné: "C'est au cas où je mourrais à cause d'une balle perdue tirée au cours d'une bavure policière... Je veux juste que tu saches que je t'adore.

- T'es con... " Répliqua Chiara avec un amusement attendri.

Florian regarda sa montre, et annonça qu'ils pourraient parer la mise à feu dans deux minutes, pas une de plus. Laurent s'enquit alors: "Hé attends, qu'est-ce qui te dit que ta montre est à l'heure?

- Ben il est quelle heure chez toi?

- Deux minutes de plus que chez toi, si t'es pas à l'heure on va le lancer trop tôt, de quoi on aura l'air?

- Je suis sûre qu'elle est à l'heure p'tit con, je la règle sur mon réveil qui se règle tout seul sur le fuseau de j'sais plus quoi là..."

Ils se disputèrent. Fathia demanda d'un air effaré: "Ils sont toujours aussi cons, ou...?

- Seulement quand ils sont bourrés, et là ils sont archi bourrés." la rassura Chiara avec assurance. Puis elle se leva et s'adressa aux artificiers d'un soir: "L'heure exacte est indiquée en gros et en chiffres lumineux sur la Tour Eiffel, crétins!"

Ils se tournèrent immédiatement vers le monument: minuit moins une! S'exclama Laurent, qui chaparda le briquet pour allumer la première fusée. Le bras de Florian voulut stopper son geste, mais trop tard: la mèche s'enflamma. "Tu l'as fait trop tôt, trop tôt!!", geignit-il. Laurent alluma ensuite la deuxième, puis une troisième, etc., tout en se défendant: "Les mèches sont hyper longues, elles vont péter juste à temps, tu verras!". Alors que Florian et Laurent étaient à nouveau à se disputer, la première fusée explosa, juste au moment où l'horloge de la Tour affichait: "00:00". Fathia alla tirer Florian par le bras en criant: "Si vous restez là à vous engueuler on va tous se faire piquer par les flics, ils seront là dans deux secondes!!".

Un peu plus loin sur un trottoir, deux gendarmes assistèrent à la scène, et virent Chiara et ses amis courir comme des dératés jusqu'au Champ de Mars. Comme le sergent ne bougeait pas, le gendarme débutant qui l'accompagnait lui signala: "Hé chef, on dirait bien que les jeunes qui viennent de courir sont responsables des feux d'artifices illicites qui viennent d'éclater.

- Peut-être. Et alors? Le sergent haussa les épaules. Pour la énième fois, 'm'appelle pas "chef", mais "sergent"!

- Hé bien sergent, on nous a ordonné d'arrêter et de faire écrouer toute personne qui ferait exploser des pétards ou des fusées ce soir car portant atteinte à l'ordre public, donc...

- T'as lu ta circulaire? L'interrompit brutalement le sergent.

- Euh oui...

- Elle parlait de pétards. Où t'as vu parlé de fusées??

- Je crois qu'elle en parlait, et de toute façon il semblerait logique de...

- Moi je te dis qu'elle n'en parlait pas!! Aboya alors le sergent. Apprends à lire les circulaires, ensuite on verra qui donne les ordres ici. Rèle n°1: obéir aux ordres. Rèle n°2: ne jamais faire de zèle! Ajouta-t-il en empoignant sa ceinture d'un air décidé.

- C'est pas ce qu'on m'a dit durant ma formation... bégaya le pauvre débutant.

- Ecoute le bleu. Le sergent le fixa droit dans les yeux. Ca m'fait déjà chier d'être là un réveillon de Nouvel An parce que j'ai pas la chance d'avoir une connasse de femme et des saletés de chiards. Ca me fait encore plus chier d'être avec TOI, qui parle comme un bouquin. Si l'autre qui doit déguster en ce moment-même du champagne à 1000€ la bouteille veut attraper les pauvres types qui balancent des pétards un soir de réveillon, il a qu'à le faire lui-même!! Toi maintenant, tu fermes ta gueule et tu fais ce que je dis, c'est comme ça qu'on apprend. Compris?

- Oui chef... Euh, sergent." Capitula le petit débutant, l'air penaud.

Toute la bande fila à toute vitesse vers le Champ de Mars pour se mêler à la foule. Là, toutes les têtes s'étaient tournées vers les lumières des feux d'artifices ; il y avait du vert, du rose, de l'écarlate. Le dernier, magnifique, semblait étendre des tentacules mauves jusqu'à l'infini. Tout autour de leur petite bande, les spectateurs demandaient: "Mais d'où ça vient, je croyais que c'était interdit?", ou s'exclamaient en montrant les jets de couleurs à leurs enfants: "Regardez ce que c'est beau...". Laurent et Florian, admiraient leur oeuvre avec fierté: "Putain mon pote, on l'a fait!", puis Florian, dans un excès d'amour fraternel, serra son ami dans ses bras: "Viens là mon Laurent, je t'aiiiiime, tu sais!". Fathia coula un regard moqueur vers Chiara, qui haussa les épaules. Elle était amusée, car elle avait tout de suite senti une attirance entre elle et Florian. Puis vint l'heure des baisers de nouvel an: elle se retrouva à faire la bise à une bonne dizaine d'inconnus et à caresser la tête d'enfants qui auraient aussi bien pu être pleines de poux. Ce soir, elle s'en fichait. Elle était avec ses amis, son homme, ils avaient illuminé le Champ de Mars à eux tout seuls et une nouvelle année commençait. 2007.


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